• Le discours amoureux entendu comme une poussière de figures qui s'agitent selon un ordre imprévisible à la manière des courses d'un insecte dans une chambre, mouche entêtante du verbe que je puis assigner à l'Amour, du moins rétrospectivement, imaginairement comme un pur devenir réglé d'avance. C'est par ce fantasme historique que parfois j'en fais « une aventure ». La course amoureuse paraît alors suivre trois étapes ou trois actes. C'est d'abord, instantanée, la capture (je suis ravi, capté par une image), vient alors une suite de rencontres (rendez-vous, téléphones, lettres, petits voyages) au cours desquelles j'explore avec ivresse la perfection de l'être aimé, c'est-à-dire l'adéquation inespérée d'un objet à mon désir. C'est la douceur du commencement, le temps propre de l'idylle. Ce temps heureux prend son identité (sa clôture, son cercle) de ce qu'il s'oppose (du moins dans le souvenir) à la « suite ». La « suite » c'est la longue traînée des souffrances, blessures, angoisses, détresses, ressentiments, désespoirs, embarras et pièges dont je deviens la proie, vivant alors sans cesse sous la menace d'une déchéance, d'un terme final qui frapperait à la fois l'être aimé et moi-même, tout comme cette menace détruirait la rencontre prestigieuse qui nous a d'abord découverts l'un à l'autre, dans une mise à nu mise à mort...

    Inspiré par Roland Barthes (fragments d'un discours amoureux)

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  • Toi qui ameutes et qui passes entre l'épanouie et le papillon sur les fleurs du chemin, reste, reste avec la vague à la seconde où mon coeur expire. Sans plus choisir entre oublier et apprendre puisses-tu me garder au vent de ta branche des amours essentiels. Tu transportes mon verbe comme l'abeille frontalière qui va sa route entre les haines et les embuscades, pour pondre son miel sur la rive d'un nuage. Toi que la nuit n'étonne plus au volet que les dormeurs tirent, toi que la poussière sur ta main occupée à tracer le vibrant poème de notre pur amour, doucement tu poudroies mon coeur d'étoiles et d'éclatante lumière. Et quand l'insupportable part solitaire de nos existences en dérive, trébuche dans l'ombre folle des midis tueurs, viens dans le reposoir de mon obscurité jeter l'éclair de ton regard...

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  • Je suis pris dans cette contradiction : d'une part, je crois connaître l'autre mieux que quiconque et le lui affirme triomphalement : "moi, je te connais". Il n'y a que "moi qui te connaisse bien", et d'autre part je suis souvent saisi de cette évidence : l'autre est impénétrable, introuvable, intraitable, je ne puis l'ouvrir, remonter à son origine, défaire son énigme. D'où vient-il ? Qui est-il ? Je m'épuise, je ne le saurai jamais... Roland BARTHES

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  • La fuite est l'engendrement de l'espace sans refuge. La fuite, seulement fuit, mouvement indéfini qui se dérobe, se dérobe et ne laisse rien où l'on puisse se dérober...

    Mise à nue, "Dévêtissement", où dans la foule, "l'être" est de fuite parce que son appartenance à la fuite le fait foule. Etre foule, multiplicité impersonnelle, non-présence sans sujet, ainsi je me déshabille pour n'être que cet "être" dissout dans "sa" fuite. Dans la foule fuyante, mon "moi" vide s'y défait et reste solitaire, sans appui, sans contour. Ainsi Egon Schiele fuyait un monde hostile, immense solitude de fuite, précipice. La parole plurielle dans sa peinture en vérité ne "parle" pas, mais fuit celui qui "parle" et l'entraîne à fuir plus rapidement qu'il ne fuit.

    Fuite stationnaire, fuite visionnaire, peinture peuple, peinture fuyante, immensité désorientée, mouvement foule, Egon Schiele est retournement. En sa peinture je me fuis, je fuis ce monde et retourne cet enfer, rend possible une liberté. La liberté, cet intervalle entre deux portes...


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  • L'infini qui s'ouvre. Ni bonheur, ni malheur. Ni l'absence de crainte et peut être déjà le pas au delà. Un sentiment inanalysable qui change ce qui reste d'existence. Comme si la mort hors de moi ne pouvait désormais que se heurter à la mort en moi. Je suis vivant ? Non tu es mort...

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